Critique de « Seeds » – Un thriller de vengeance autochtone au cœur battant

En 2013, le cinéaste Mi'kmaq Jeff Barnaby présenté Comptines pour jeunes goules au TIFF. C’était un récit de vengeance sauvage qui reprenait les horreurs des abus dans les pensionnats qui ont tourmenté des générations de jeunes autochtones et les situait dans une structure de film de genre, permettant aux tropes des films d’horreur traditionnels de faire écho aux réalités de la vie dans la réserve. Son film n’était pas le premier à établir ouvertement ce lien via ce style cinématographique, mais le caractère unique de sa présentation était si profond, le film si accompli, qu’il a changé à jamais la perspective par laquelle j’ai compris ces histoires, en utilisant des éléments de fiction pour aborder plus profondément des vérités effrayantes. Barnaby a perdu sa bataille contre le cancer en 2022, et sa voix me manque profondément. Mais, en regardant Graines, Corne de KaniehtiioGrâce à ses débuts en tant que réalisateur, j'ai pu voir les prémices de ce qu'il a apporté au grand écran, un lien entre son héritage et un avenir brillant pour le cinéma canadien en général, et pour la narration autochtone contemporaine en particulier.

À sa surface, Graines est une farce pulpeuse, mêlant une comédie générale, des moments effrayants d'effroi et une horreur de vengeance totale pour créer un mélange divertissant de grindhouse. Pourtant, au-delà des seaux de sang et des messages écologiques, il y a bien plus d'éléments plus profonds à observer en y regardant de plus près. Du mélange désinvolte de langues autochtones et coloniales changeant au milieu d'une phrase, à la reconnaissance amusée des charmes et des défis structurels de la vie dans les réserves, il y a un sarcasme désinvolte qui est contagieux. Ajoutez à cela la notion de liens générationnels qui sont souvent aussi traumatisants qu'édifiants, ainsi que le refus simple mais courageux d'accepter les lignes invisibles de l'isolement que le compromis social et culturel que le système des réserves a favorisé, on peut facilement trouver la véritable obscurité explorée de manière subtile qui va bien au-delà même des événements les plus horribles que nous voyons se dérouler à l'écran.

De quoi parle « Seeds » ?

Corne de Kaniehtiio en graines
Image via Levelfilm

Le film commence avec Ziggy (jouée par Horn elle-même), une femme Kanien'kehaka vivant dans la grande ville, qui fait fureur sur les réseaux sociaux en tant qu'influenceuse à temps partiel et livreuse de nourriture à temps plein. Dans ses clips, elle injecte des histoires sombres de sa culture mohawk avec une joie écarquillée, racontant des histoires de membres démembrés qui marchent encore ou la pratique cannibale consistant à dévorer le cœur d'un ennemi. Renversant et déconstruisant la notion même de soi-disant « sauvagerie », Ziggy débite ces histoires comme un mélange de friandises dignes des tabloïds et d'une pincée de zèle télévisé sur les faits divers, tout en s'adressant à une communauté plus large qui embrasse le plaisir salace de ses histoires.

Ziggy s'endort sur son canapé en écoutant de vieux épisodes de Pièce A : Dossiers médico-légauxune émission canadienne mièvre mais populaire d'il y a une dizaine d'années, animée par l'acteur légendaire Graham Greene. Une vision plus ancienne de Greene, peut-être mieux connue du public international pour son rôle dans le film oscarisé Danse avec les loupsapparaît à Ziggy dans son sommeil et lui parle directement depuis la télévision, avec « Oncle G » l'exhortant et l'encourageant à trouver une direction différente dans sa vie et à se méfier des opportunités qui semblent trop belles pour être vraies. Ziggy est bientôt mise en relation avec un sponsor pour ses publications et se voit promettre des richesses pour promouvoir Nature's Oath comme un avantage pour son public. Vêtue de tenues ornées du logo, elle aide à faire connaître ce conglomérat agrochimique à ses abonnésillustrant comment la plantation d'une petite graine peut entraîner une croissance future parfois étonnante. Cette grande métaphore est bien sûr à double sens, car une graine plantée peut fleurir et devenir une plante saine ou métastaser et devenir quelque chose de tout à fait destructeur. Ce sont ces significations jumelles, entre la lumière et l'ombre, ou entre les horreurs du passé et l'espoir d'un avenir meilleur, qui injectent certaines des idées les plus saillantes qui élèvent l'histoire de Horn au-delà du simple divertissement.

« Seeds » devient un thriller de vengeance peu orthodoxe

Lorsque Ziggy est appelée par son cousin loufoque mais charismatique (Dallas Goldtooth) pour garder la maison de sa parente partie en Nouvelle-Zélande pour draguer des hommes maoris séduisants et se prélasser au soleil, elle se retrouve une fois de plus dans le confort et la claustrophobie de l'endroit où elle a grandi. Avec un chat en remorque et des difficultés à trouver un signal cellulaire, les défis logistiques quotidiens deviennent bientôt des questions de vie ou de mort, alors qu'un mystérieux inconnu est à la recherche de l'héritage de sa famille pour l'utiliser à des fins néfastes.

Alors que l'histoire de la bande dessinée légère devient de plus en plus sombre, Le film de Horn parvient à empêcher les balayages tonaux de glisser hors de contrôle. Ceci est aidé par un bel ensemble — y compris Meegwun Fairbrother, Dylan Cooket même Greene lui-même, qui parvient à maintenir le cap même lorsque les événements tournent mal. D'un côté, tout se déroule selon des principes moraux en noir et blanc, avec des ennemis clairs en lutte avec notre héroïne. Pourtant, tout au long du roman, il y a des éléments qui germent de manière plus subtile, ne succombant jamais au didactisme mais faisant toujours avancer l'histoire.

Le résultat final est un film très divertissant et très provocateur qui apporte le meilleur d'un thriller de vengeance avec un peu de profondeur dans l'expression culturelle. Comme toute culture hybride, ce genre de mélange peut au mieux produire quelque chose de mieux que la somme de ses parties, tout en risquant de devenir un peu plus qu'un fouillis incohérent. Entre les mains expertes de Horn, elle suit habilement l'exemple de mon ami Jeff Barnaby qui nous manque tant, en semant Graines avec amour et en offrant au public une dose de plaisir tonitruant et brutal tout au long du parcours.

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